![]() |
De Fernand le 14/10/2015 Serge REGGIANI (Sergio) - Reggio Emilia (Italie) 2.5.1922 - Boulogne-Billancourt (Hauts de Seine) 23.7.2004. Ses parents, Ferruccio Reggiani , son père et Letizia Spagni, sa mère, ont fui l'Italie fasciste. Dans ce pays, ils ont vécu dans une maison minuscule. Sergio dormait dans la même pièce que ses parents. Son père était un homme fruste, plus souvent avec ses copains qu'à la maison. Serge était proche de sa mère, une femme possessive. Il a eu un petit frère Luciano, décédé prématurément d'une pneumonie. Le père avait trouvé du travail à Yvetot en Normandie. La mère et son fils âgé de 8 ans l'ont rejoint par la suite. Ils sont arrivés dans cette ville, par le train à quatre heures du matin. Serge ne parlait pas un mot de Français. Plus tard, à l'école, il deviendra le meilleur élève en Français. Ils sont restés quelques mois à Yvetot. Après son certificat d'études, d'abord apprenti coiffeur, le métier de son père, Serge s'inscrit au conservatoire des arts cinématographiques à Paris, où la famille s'est installée en 1931, dans le Faubourg Saint Denis. Puis il fréquentera le conservatoire d'art dramatique peu avant la guerre de 1939. Il a interprété des sketches dans les noces et banquets, puis fera de la figuration au théâtre. Il sort du conservatoire en 1941, avec un prix de comédie et de tragédie. Sa carrière au théâtre démarre en 1941, dans "le loup-garrou". Il est depuis 1942, l'un des grands comédiens du théâtre et du cinéma français. Au théâtre, il a joué des pièces de Cocteau, Prévert, Sartre et Camus. Il a tourné dans le carrefour des enfants perdus (1943), les portes de la nuit (1946), Manon (1948), retour à la vie (1948), les amants de Vérone (1948), au royaume des cieux, les anciens de Saint Loup (un policier de 1950), la ronde, casque d'or, Napoléon, échec au porteur, les misérables (1957), Marie Octobre (1958 - avec Danielle Darrieux), Vincent François Paul et les autres, le bon et les méchants, le petit garçon (1995). Ses rôles au cinéma font de lui une vedette. Mais les propositions se font rares. Les jaloux disent qu'il porte la poisse ! "L'enfer" en 1964 a été si éprouvant que Reggiani a arrêté quelque temps le cinéma et ce film ne sortira jamais. Il a rencontré sa 1ère femme, Janine Darcey (1917-1993) sur le tournage du "Carrefour des enfants perdus" en 1943. Il l'épousera le 5.6.1945 et auront deux enfants : Stéphan (1945-1980) et Carine (une chanteuse - 1951). Ils divorceront en 1955. Le 4.5.1959, à Paris, il épouse une actrice, Annie Noël (1926-2009), rencontrée lors de l'interprétation d'une pièce de théâtre. Ils auront trois enfants : Célia en 1958, Simon en 1961 et Maria en 1963. Le couple a vécu à Mougins (Alpes Maritimes), où il s'était fait construire une maison. Ils se sépareront en 1973. Noëlle Adam (24.12.1933), actrice, partagera ensuite la vie du chanteur. Ils se marieront le 21.3.2003. Entre 1966 et 1968, Serge Reggiani a vécu une liaison avec la chanteuse Barbara. Egalement avec Romy Schneider. En 1948, Reggiani avait obtenu la nationalité française. C'est sur le tard, à la quarantaine, en 1963, sur les conseils de Barbara qui l'a aidé en lui donnant des leçons et de Brel, qu'il se lance dans la chanson avec "les loups sont entrés dans Paris" qui fait un triomphe (les loups désignent les Allemands de 1940) et qu'il interprète d'une voix de baryton chaude et pénétrante. Canetti, rencontré chez Simone Signoret, lui avait proposé d'enregistrer un album de chansons de Boris Vian en 1964, avec une interprétation du déserteur. Parmi d'autres titres : le petit garçon, ma liberté. Il débute sur la scène de Bobino en 1966, en première partie de Barbara, puis en 1968. Les albums s'enchaînent : Gaspard (1969), Sarah (1969), la vie c'est comme une dent (1967), l'hôtel des rendez moi ça (1968) et puis (1969), je voudrais pas crever, rupture, le vieux couple (1972), l'Italien (1971 - l'histoire d'un homme parti et pas revenu), hôtel des voyageurs, le monsieur qui passe, le barbier de Belleville (une chanson amusante sortie en 1977 écrite en rimes riches pour lui donner un aspect très littéraire), si tu me payes un verre (sur des paroles de Bernard Dimey), le Pont Mirabeau. Le texte de cette dernière chanson est extrait du recueil "alcools" publié par Guillaume Apollinaire (1880-1918), en 1913. L'auteur y fait allusion à sa rupture avec Marie Laurencin (1883-1956), une artiste peintre avec laquelle il a vécu jusqu'en 1912. Les deux amoureux passaient souvent sur le pont Mirabeau qui enjambe la Seine. Une méditation sur la fuite du temps et de l'amour : une chanson triste. "Il suffirait de presque rien" (1968) - Dans cette chanson de Serge Reggiani, une jeune fille de 20 ans est amoureuse d'un monsieur plus vieux qu'elle, de dix-vingt ans. Pourquoi faire du cinéma : fillette regarde moi et vois les rides qui nous séparent. A quoi bon jouer la comédie du vieil amant qui rajeunit. Elle est au printemps, lui en hiver. Personne ne repasse par sa jeunesse. C'est un autre que moi demain qui t'emmènera à Saint Germain, t'offrir un café-crème. "Sarah" (1969) - Une chanson fétiche de Georges Moustaki, interprétée par Serge Reggiani. C'est une oeuvre atypique qui décrit une femme qui n'a plus vingt ans depuis longtemps. Elle a les yeux cernés, le teint blafard malgré le fard, le dos voûté. C'est l'histoire d'un couple peu épargné par l'existence et qui se retrouve. C'est ce que suggèrent les derniers vers de la chanson : "et c'est son coeur couvert de pleurs et de blessures qui me rassure". Une chanson qui fait partie du tiercé gagnant après le théâtre et le cinéma. "Ma liberté" (1970 - Reggiani rencontre Moustaki qui va lui écrire cette chanson populaire de qualité qui touche toutes les générations, surtout les jeunes. L'histoire se termine mal : "ma liberté, je t'avais tout donné, ma dernière chemise.... j'ai changé de pays, j'ai perdu mes amis pour gagner ta confiance". "Le vieux couple" (1972). A l'époque de la chanson, Reggiani atteint la cinquantaine. Sa gueule, ses rides, sa voix un rien chevrotante le rendent crédible dans le rôle d'un mari blasé. A partir du second couplet, on apprend qu'il ne s'adresse pas à une femme, mais à un compagnon de solitude et de beuverie. Bref un vieux copain, tout aussi esseulé à qui Reggiani dit dans le dernier couplet : "mon ami, mon copain, mon frère, mon refuge, mon valet de coeur..... je ne voudrais pas que tu meures". En 1975, Reggiani partage la scène de Bobino avec son fils Stéphan. Ils feront une tournée au Québec. En 1980, il sombre dans la dépression, suite au suicide de son fils Stéphan. Il remonte la pente en 1988 et jusqu'à la fin de sa vie, rencontre son public dans les salles de spectacles comme le palais des congrès en 1993, l'Olympia. Il se produit dans sa ville natale en Italie. Il enregistre plusieurs nouveaux albums, tout en se consacrant parallèlement à la peinture. "Nos quatre vérités" est l'un de ses derniers albums en studio en 1997 ; le dernier étant "enfants soyez meilleurs que nous" en 2000. Serge Reggiani avait peur de décevoir, c'était un tourmenté, pas sûr de lui. Il ne sera jamais un homme apaisé, noyant sa mélancolie dans l'alcool. Il était attachant et semblait avoir trouvé la paix, à la fin de sa vie, en se consacrant à la peinture. Ce baryton de la chanson française disparaît à 82 ans, victime d'une crise cardiaque, à son domicile. Il a été inhumé au cimetière du Montparnasse. |